Chaque année en France, des milliers de patients sont victimes d’erreurs médicales, parfois avec des conséquences dramatiques : invalidité, douleurs chroniques, perte d’autonomie, voire décès. Qu’il s’agisse d’un aléa thérapeutique, d’une faute technique, d’un retard de diagnostic ou d’une infection nosocomiale, les victimes se retrouvent souvent démunies face à un système médical difficile d’accès.
Pourtant, le droit français prévoit des voies de recours, qu’elles soient amiables ou judiciaires. Cet article vous guide, étape par étape, pour faire valoir vos droits.
Qu’est-ce qu’une erreur médicale ?
Une erreur médicale, lorsqu’elle est fautive, est une défaillance survenue au cours d’un acte de prévention, de diagnostic ou de soin, causant un dommage au patient. Elle peut résulter :
d’une faute technique (gestes médicaux inadaptés, mauvaise utilisation d’un dispositif, oubli de corps étranger)
d’un retard ou défaut de diagnostic
d’une négligence dans la surveillance ou le suivi du patient
ou encore d’un manquement au devoir d’information ou au recueil du consentement.
Il ne faut pas confondre erreur médicale fautive et accident médical non fautif. Dans certains cas, un acte médical peut entraîner un dommage sans qu’il y ait de faute : on parle alors d’aléa thérapeutique. La réparation du dommage dépendra du type d’erreur et du régime juridique applicable.
Quels sont les recours possibles pour les victimes ?
La procédure amiable devant la CCI
La Commission de Conciliation et d’Indemnisation des accidents médicaux (CCI) permet d’engager une procédure amiable, rapide et gratuite.
Cette commission est compétente en cas de :
faute médicale
accident médical non fautif (aléa thérapeutique)
infections nosocomiales
affections iatrogènes (effets secondaires graves de traitements)
Une requête devant la CCI sera déclarée recevable si certains seuils de gravité sont atteints :
incapacité permanente ≥ 24 %
arrêt de travail de plus de 6 mois
altération grave des conditions de vie
Si la faute est reconnue : c’est l’assureur du professionnel ou de l’établissement de santé qui indemnise la victime.
Si aucune faute n’est retenue mais que les conditions juridiques de l’accident médical non fautif sont remplies : c’est l’ONIAM (Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux) qui prend le relais et indemnise la victime au titre de la solidarité nationale.
L’action en justice
En l’absence de solution amiable satisfaisante, la victime peut saisir :
le tribunal judiciaire si l’acte a été commis par un professionnel de santé libéral,
le tribunal administratif si le soin a été réalisé dans un hôpital public.
Il s’agit alors d’une action en responsabilité civile ou administrative, nécessitant un accompagnement rigoureux et, souvent, une expertise judiciaire.
Le rôle essentiel du dossier médical
Le dossier médical est une pièce essentielle pour faire reconnaître l’erreur médicale. Il retrace l’ensemble des actes réalisés, prescriptions, comptes-rendus opératoires, échanges avec les soignants, etc.
Toute victime d’un accident médical a le droit d’en demander une copie à l’établissement de santé, sans avoir à justifier sa demande.
Ce document est indispensable pour :
identifier d’éventuelles fautes ou anomalies
permettre à un médecin conseil de victimes d’émettre un premier avis médical avant toute procédure
L’importance de l’expertise médicale
L’expertise médicale permet d’évaluer :
la réalité du dommage
le lien de causalité avec l’acte médical
les conséquences sur la vie du patient
Elle peut être :
amiable (dans le cadre d’un recours devant la CCI)
judiciaire (dans le cadre d’un procès)
Il est fortement recommandé d’être assisté par un médecin expert indépendant, spécialisé dans la défense des victimes, afin de contester les arguments des experts mandatés par les compagnies d’assurance ou les établissements de santé.
Quels sont les préjudices indemnisables ?
Le droit français repose sur le principe de réparation intégrale du préjudice, conformément au référentiel Dintilhac, utilisé comme base par les juridictions et les experts.
Les préjudices patrimoniaux
Dépenses de santé actuelles et futures non prises en charge
Pertes de revenus (avant et après consolidation)
Frais liés à l’aide humaine ou à l’adaptation du logement
Les préjudices extrapatrimoniaux
Déficit fonctionnel temporaire et permanent
Souffrances endurées
Préjudice esthétique
Préjudice d’agrément (perte des activités de loisir)
Préjudice sexuel
Préjudice d’établissement (impossibilité de fonder une famille)
L’indemnisation peut être versée en une seule fois ou sous forme de rente, selon la nature du dommage.
Pourquoi faire appel à un avocat spécialisé en droit du dommage corporel ?
Les erreurs médicales relèvent d’un droit technique, à la croisée du droit civil, administratif et du droit de la santé.
Il est donc vivement conseillé de se faire assister par un avocat expérimenté pour :
évaluer l’opportunité d’un recours amiable ou contentieux
constituer un dossier solide, en lien avec le médecin conseil
représenter la victime devant les instances (CCI, juridictions)
garantir que l’offre d’indemnisation soit conforme à l’ampleur des préjudices